Tout parti totalitaire s’articule en deux bords : l’un destiné à la façade et l’autre qui ne concerne que sa vie interne. Pour la façade, le grand public, les militants de base et les sympathisants, toute la propagande repose sur une absence de réflexion entretenue par un sentimentalisme pleurard : Les Mères de la Paix et celle des soldats tombés, les enfants, les femmes que l’on met en avant dans les manifestations, etc. Car l’attendrissement refuse toute critique raisonnée sous prétexte que l’on ne discute pas avec des gens « qui ont tellement souffert ». Naturellement, les cercles internes, eux, sont régis par un grand cynisme. Peu importait véritablement la libération de qui que ce fût (peuple, femmes, masses paysannes) pas plus qu’une avancée démocratique réelle. Lors de la création du Parlement Kurde en exil, deux de ses responsables se virent signifier par Öcalan lui-même que tout ceci n’était que poudre aux yeux des Européens et que naturellement tout serait contrôlé au sommet. L’activité principale des cadres ne consista bientôt plus qu’à garder la tête hors de l’eau dans les querelles internes, les luttes de pouvoir, les nominations et désistements arbitraires, et surtout à éviter la disgrâce du chef.
Et les Kurdes dans tout cela ? Ils ont été décimés en Turquie, coincés entre deux dogmes : l’un qui leur déniait toute existence en tant que Kurdes, au mépris le plus absolu des faits historiques et l’autre qui leur apprit à ne plus êtres des hommes mais des masses arriérées qu’il fallait transformer. Les deux fléaux contribuèrent largement à la destruction de la culture kurde et de son organisation sociale.